Numéro 21,  Propositions de lecture

Le Coaching scolaire | Anne Claudine Oller

Coaching scolaire
Le Coaching scolaire. Un marché de la réalisation de soi,

Anne Claudine Oller,
Presses universitaires de France, Coll. « Éducation et société »,
Paris, 2020, 270 p.

Note lecture présentée par Erwan Lehoux

Anne-Claudine Oller nous livre dans cet ouvrage une synthèse très accessible de ses travaux sur le marché du coaching scolaire, qu’elle définit comme un « accompagnement non disciplinaire de la scolarité – c’est-à-dire non basé sur une discipline scolaire  », contrairement aux cours particuliers notamment. Une publication qui tombe à pic à l’heure où la pratique semble se développer, à la faveur des récentes réformes du lycée et de l’entrée dans l’enseignement supérieur. Une impression confirmée par l’auteure qui montre néanmoins que le frémissement observé sur ce marché est en fait un peu plus ancien, même si les élèves qui en bénéficient demeurent assez minoritaires.

Sans surprise, l’accès au coaching scolaire se révèle très inégalitaire. Sont principalement concernés des élèves dont les parents appartiennent à la catégorie des « technocrates »[1]Voir Agnès Van Zanten, Choisir son école. Stratégies familiales et médiations locales, Paris, Presses universitaires de France, 2009, 283 p., autrement dit, au pôle privé des couches moyennes supérieures. Au-delà du coût, qui varie selon l’auteure de 50 à 150 € pour une séance d’une heure et demi, Anne-Claudine Oller met surtout en évidence le rôle déterminant d’un certain nombre d’habitudes et dispositions culturelles parmi lesquelles la proximité que les familles entretiennent avec le monde de l’entreprise, le stress voire les craintes des parents comme des enfants face aux enjeux croissants de la scolarité alors que la concurrence scolaire s’intensifie, mais aussi le sentiment d’ « avoir droit  » à un accompagnement, le fait d’être enclin à dépasser ses propres limites, d’être en quête d’autonomie ou encore de rechercher l’épanouissement personnel par la réalisation de soi.

Ce dernier objectif apparaît central dans l’analyse de l’autrice, à tel point qu’il figure dans le sous-titre de l’ouvrage. Elle montre ainsi comment le coaching scolaire répond à la demande des familles en la matière et comment il contribue à conforter les élèves dans cette quête individuelle. Néanmoins, on pourra regretter que la construction sociale de cet objectif et ses répercussions en matière d’éducation ne soient pas vraiment abordées. Surtout, au-delà du discours, du côté des coachs comme du côté des familles et des élèves, la traduction concrète de cette quête de soi gagnerait sans doute à être davantage interrogée : comment les pratiques des coachs permettent-elles de répondre aux attentes des jeunes en la matière ? Quels sont leurs effets sur les représentations que ces jeunes ont de leur scolarité, de leur orientation, de leur avenir et finalement d’eux-mêmes et de la société ? Quelles en sont les conséquences sur leur rapport à l’école et sur leurs choix d’orientation ? Autant de questions qui mériteraient d’être développées, à la lumière des évolutions contemporaines de l’école. Une comparaison entre les pratiques des coachs scolaires et celles des psychologues de l’Éducation nationale – et de leurs éventuels effets performatifs – pourrait également être envisagée.

Notes[+]