Édito | La laïcité est-elle encore révolutionnaire ?
En 2015 le terme de laïcité instrumentalisé, galvaudé, détourné n’est que fort peu associé à l’idée de révolution… et pourtant ! Alors qu’elle trouve sa source, avant même que le terme n’existe, dans la remise en cause du pouvoir absolu en 1789, la laïcité ne cesse d’être réduite, défigurée, maltraitée, affublée d’adjectifs qui en trahissent le sens. Est-ce à dire qu’en ses principes mêmes, élaborés dans un long processus, elle dérange l’ordre établi ? Oui quand elle affirme l’égalité des droits contre l’exclusion sur des critères ethniques, culturels, religieux, économiques ; oui quand elle prône les solidarités contre « le choc des civilisations » ; oui encore quand elle reconnaît à chacun et à chacune le pouvoir de décider, de penser contre tous les dogmes pour agir avec les autres.
« Le ventre est encore fécond d’où est sortie la bête immonde » prévenait Brecht. Il s’agit donc de redonner corps et chair à la laïcité, indissociable de la démocratie, en retrouvant son histoire, identifiant ses enjeux, contre tout catéchisme, y compris quand il se réclame de la gauche. La laïcité est encore révolutionnaire quand elle est un bien commun qui permet de faire exister la chose publique. La laïcité est encore révolutionnaire quand elle dénonce les dangers qui pèsent sur la société et en particulier sur son système éducatif, afin de l’émanciper de l’emprise néolibérale.
Christine Passerieux