Lectures Jeunesse,  Numéro 6

Sans frontières fixes

Sans frontières fixes
Sans Frontières fixes,
Jean Pierre Siméon, Cheyne, Poèmes pour grandir, 2001.

Lecture jeunesse proposée par Daniel Sereno

Tout au long des 26 poèmes, Jean Pierre Siméon interpelle l’humain dans sa complexité, ouvre des fenêtres sur le monde. Lorsque le regard du lecteur s’attarde aux mots, aux images fortes qui cognent aux vitres, il n’en sort pas indemne. Si la poésie est résistance, elle est aussi combat intransigeant pour un monde en devenir, pour une humanité sans cesse à conquérir. Dans ce recueil, l’auteur donne à voir l’obscur, suggère l’impensable et l’impensé.

“ notre mémoire est lourde
de ce que nous n’avons pas vécu ”
(…)
“ il n’avait plus
d’enfants ni de cheveux
ni d’os ni de vieillards ni de sourires
dans le gris épais
de la cendre ”

On retrouve en cheminant dans les textes, à lire, à relire, à partager ce qu’il écrivait déjà dans « La poésie n’est pas un jeu : « La poésie étend le regard, élargit l’espace, bouleverse le temps, repousse plus loin les limites du visible. »

Les textes s’ancrent dans le réel du monde. Sans concession, ils percutent le quotidien, questionnent ce qui fait homme. Ils rappellent dès le premier poème la force de l’engagement du poète :

“ tant qu’un jour se lèvera
sur le front noir
d’un fusillé
je ne parlerai pas
des arbres ”

Nul désespoir dans ces lignes rudes, abruptes. Derrière les mots un chant d’espérance en l’homme, en l’humanité. Les illustrations de Martine Mellinette viennent caresser les pages en traces, en entrelacs. Elles laissent voyager en glissant sur les mots au gré des hésitations et des doutes. « Sans frontières fixes » bouscule l’intime, les murs qui enferment, les frontières qui divisent.

Arrachez les drapeaux
qu’ils soient la nappe immense
sur la table des hommes.

26 poèmes pour grandir, est une invitation au difficile voyage de soi vers les autres vers un monde nouveau de partage et de fraternité. Un monde à venir.

Fils
je parie
ton monde
contre le mien.