Demain le syndicalisme
Demain le syndicalisme.
Repenser l’action collective
à l’époque néolibérale,
Louis-Marie Barnier, Jean-Marie Canu, Christian Laval et Francis Vergne,
Coll. : Comprendre et Agir, Syllepse, Paris, 2016, 130 p.
Note de lecture proposée par Erwan Lehoux
Membres de l’Institut de recherche de la FSU, les quatre auteurs de ce petit ouvrage interrogent les enjeux et les défis auxquels est confronté le syndicalisme aujourd’hui. Alors que certains néolibéraux n’ont jamais caché leur volonté d’en finir avec les syndicats, d’autres, d’une manière peut-être plus subtile, préféreraient les intégrer au jeu du libre marché. Cette dernière orientation, défendue par les ordolibéraux allemands, s’entend dans une logique plus générale qui consiste à faire adhérer les salariés à la raison néolibérale. C’est ainsi que les syndicats sont considérés comme des partenaires sociaux qui, dans le cadre du dialogue social, négocient avec le patronat de manière à pacifier les relations sociales au sein des entreprises. À terme, il s’agit de responsabiliser les syndicats et les salariés qu’ils représentent en les convainquant qu’ils partagent avec leur patron le même intérêt, celui de l’entreprise.
Tandis que certains syndicats se sont progressivement accommodés du rôle qui leur est assigné, d’autres cherchent à s’en extirper mais ne parviennent pas toujours à éviter les pièges qui leur sont tendus… Les auteurs insistent en premier lieu sur le règne de la concurrence généralisée qui s’étend dans tous les domaines de l’existence et qui déstabilise les syndicats. De fait, ces derniers ont parfois tendance à participer au jeu de la concurrence, en veillant à la promotion de chacun au sein de l’entreprise (gestion de carrière, reconnaissance des compétences, etc…) et non plus à la défense du collectif. De même, au nom de la compétitivité, ils sont invités à sacrifier des conquêtes sociales en échange d’un hypothétique maintien de l’emploi, ce que la Loi Travail ne manquera pas de renforcer. En second lieu, un chapitre est consacré au dialogue social, dans lequel le syndicalisme s’enlise puisque ce dernier consiste en un cadre fixé par le patronat dont il convient de respecter les règles.
Les trois derniers chapitres de l’ouvrage parcourent quelques pistes qui pourraient permettre au syndicalisme de faire face au contexte néolibéral. D’abord, face à un patronat qui s’organise par-delà les frontières nationales, les auteurs invitent à repenser l’action syndicale au niveau européen et mondial. Ils traitent ensuite de la reconstruction des syndicats et de l’élaboration de contre-propositions. Les mutations de la société – notamment l’installation d’un chômage structurel de plus en plus important et le développement des emplois précaires – obligent en effet les syndicats à renouveler leurs pratiques mais aussi leurs revendications. En particulier, les auteurs interrogent l’idée de créer des droits attachés à la personne : si elle peut constituer une réponse intéressante, il convient de se méfier de toute récupération néolibérale… Enfin, le dernier chapitre ouvre un horizon plus vaste, qui place le syndicalisme au cœur de la lutte contre le néolibéralisme, aux côtés d’autres mouvements. Dans cette optique, les syndicats sont appelés à renouer avec une perspective de transformation sociale, alliant projet de société global et luttes et expériences locales.
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